Togo 1 – PREMIER RECIT TOGOLAIS

10 avril 2009

Bonsoir !

Si tu reçois cette lettre c’est que tu es dans la liste très VIP des gens à qui j’écrirai depuis le Togo. Super, quelle chance ! Et oui tu te sens maintenant flatté jusqu’à la moelle et vibre sous chacune de ces petites billes de bonheur traversant ta colonne vertébrale. Mais bon, il faut te ressaisir, et écouter, lire, vivre, sentir, ressentir la suite de ce courrier ! Le Togo ne se dit pas avec des mots, il faudra faire travailler ta boite à imagination et te lancer sur ce train étrange avec moi.

Ah oui, tu seras peut-être surpris ou surprise.
« Quoi, il est en Afrique ce gugus ? C’est bien lui ? »
Tout le monde n’ayant pas accès aux mêmes données concernant ma situation actuelle, je vais reprendre du début pour les oubliés de l’année.

Faisons bien, faisons court, non pas à l’Africaine. 2008 marquant la reprise de mes études, 2009 une grève étudiante aussi colossale qu’égoïste, me voici en 2010 à terminer une licence pro en protection de l’environnement mention « Animateur Agri-Environnement » à Metz. Metz, ca fait pas rêver du tout. Le Togo par contre ça fait rêver. Le Togo, c’est mon stage. Non, c’est aussi un pays entre le Ghana et le Bénin, soit entre la Côte d’Ivoire et le Cameroun, ou bien entre le Burkina et … l’océan, et entre nous c’est pas bien grand. Je suis sur place depuis le 17 Avril pour 4 mois et une pincée de jours afin de participer aux activités d’une ONG sur le terrain.

Justement voilà une vue du terrain: la région des plateaux, ici depuis le mont Kloto

Pour expliquer en quoi consiste ma mission, il faut prendre l’histoire par les racines. Il y a eu une guerre que l’Allemagne perdit. Il y a eu le Togo, Colonie Allemande. La France et l’Angleterre ne voulaient pas vraiment reprendre ce territoire, ni le laisser aux Allemands. On en coupe donc des petits bouts, on en donne au Ghana, au Bénin sous tutelle de la France, puis on en rend une fine bande aux Togolais. Du coup, on appel ce pays le « sourire de l’Afrique ». Prospère à cette époque, le Togo sera également dénommé « la Suisse Africaine ». Mais là, l’indépendance tombe en 1960, et n’étant qu’un pays sous tutelle le Togo ne bénéficie pas du protectorat Français. La situation se dégrade alors petit à petit. Aujourd’hui, les Togolais ne croient plus en leurs politiques… qui le leur rendent bien. Beaucoup d’argent gaspillé, détourné, un fort désintéressement des grands hommes pour les populations rurales, bref un peuple boudé lui même boudant les boudeurs. Les uns sont riches, les autres pauvres, cherchant l’autosuffisance les familles se tournent vers l’agriculture. En effet la terre fertile offre encore un peu de tendresse à ses enfants, leur permettant de nourrir chacun. Mais voilà, les techniques s’intensifient, les besoins augmentent, la terre se dégrade, tout comme les eaux, les êtres, la vie. Pour accompagner les producteurs, il existe bien des chambres d’agricultures… toutes en pannes telles des cadavres de bateaux rouillés en mer Baltique. Jamais ou presque un paysan n’a vu l’ombre d’un technicien, ni même d’un Yéti, d’un Dahu, Mammouth, Loutre ou encore Martien. Pourtant le peuple n’est pas aveugle et a parfaitement vu qu’il se dirigeait dans le mur, comme quoi les murs sont plus fréquents que les Martiens et les techniciens agronomes, ou plus simples à distinguer. C’est pourquoi les Togolais ont commencés à s’organiser au travers d’associations pour l’environnement. Boudées par l’état, elles ne reçoivent aucune subvention, survivants par le courage de leurs exécutants ou quelques maigres fonds Européens pour les plus tenaces.

Une vue du Ghana. Vous me direz y’a pas forcément grande différence avec le Togo… c’est normal c’est à peu près pareil. En plus la photo est prise pile sur la frontière… ça aide pas

AVES Togo, Association des Volontaires pour l’Environnement Sain au Togo, est l’une d’entre elles, et Selom Agbavito son vaillant directeur exécutif. Il a étudié les lettres, vénère le dieu saucisson, mesure 1m65, et vit à Kpalimé au siège de l’association, avec des frères vaillants, avec des sœurs vaillantes, des volontaires vaillants, et de vaillants stagiaires comme moi. Oui, ici tout le monde est vaillant mais c’est une autre histoire. Durant mon stage mon rôle sera de m’intégrer à certains villages plus ou moins isolés, éduquer les enfants sur la biodiversité, diagnostiquer l’état des pratiques paysannes, accompagner les agriculteurs et arboriculteurs, les sensibiliser à l’environnement, participer à des programmes de replantation d’essences forestières, tout ça tout ça. Je devrais aussi manger des manges magiques, des ananas sensationnels, et des avocats gratuits. (Tout le monde sait ce que coute un avocat en France … surtout en cas de divorce. Ben au Togo c’est pas les mêmes, et ils sont moins durs). Je devrais surtout dormir à même le sol, supporter 40°, slalomer entre les moustiques, apprendre l’éwé, prier pour que vienne la saison des pluies, tout ça tout ça …
Je m’étendrais sur ces vaillantes activités plus tard, sinon j’aurais plus rien à dire et ce serait vaillamment moche.

N’ayant pas de photo de moi slalomant entre les moustiques, je vous ressert le Ghana sous un début de soirée

Mais, comme dans toute aventure épique parfumée d’exotisme et d’humanisme Tutti Fruti, il y à une femme. Armony. Oui c’est comme ca qu’on l’appelle. Pas plus de jeu de mot futile autour du prénom, ce serait se vautrer dans la facilitée et la routine, je ferais donc l’eunuque, je m’abstiens par obligation. Le seul commentaire valable sur son nom prend cette forme: « à la fois piquant et sucré, la promesse d’un équilibre … une douce chaleur émane à chaque prononciation réchauffant oreilles et cœur ». Si avec ca si tu vois pas, je peux pas t’éclairer davantage, désolé.
Bref, nous partîmes donc de Lyon, ma fidèle compagnon et moi, rugissant d’impatience un beau soir d’avril. Tels Belle et Sébastien nous étions seuls et perdus, elle en Sébastien mais plutôt belle, moi comme Belle suivant Sébastien. Tu suis ? Bon disons qu’il s’agit d’une très bonne amie de classe et qu’on à tenté le même stage. On se lance donc à 2 dans l’obscurantisme culturel Africain fuyants nos villes prosaïques vomissantes de cette pléthore de pécores qui ignorent leur propre existence devant une boite à connerie câblée et satellisée. Respire, , , , , je sens que tu as mieux compris.

Donc. Une journée tous frais payés à Casablanca pour cause de report d’avion, et nous voilà à Lomé, capitale du Togo, aux alentours de minuit. Chaleur étouffante, accueil tout aussi chaleureux et, heureusement moins étouffant, une nuit sur place et vroum, entassés dans un « taxi » au petit matin, direction Kpalimé, quartier Tsivé !

Kpalimé

La plaine de Kpalimé vue des sommets

Ensuite…

Oulà mon clavier se durcit, les mots protestent. Hein, il se passe quoi ? Des revendications syndicales ? Mon matériel me transmet un préavis de grève et mon Français manifeste. Ici on appel ça courant instable et fatigue à bâbord. Très bien, quelques jours de congés pour eux, je ne veux pas passer pour un mauvais patron. Alors la suite au prochain épisode après le plan de restructuration. Les premiers jours au Togo, le peuple, l’accueil, Kpalimé, l’ONG, les villages … mais j’en ai trop dit !

A bientôt
Sylvain